Jacqueline, la meilleure recruteuse, accueillante, dévouée pour tous...
Photos souvenirs Les derniers instants et consolation....
Oraison funèbre à l'église de Nontron
Jeudi 27 juillet 2023,
Cher(e) s ami(e) s
Vous venez d'écouter Serge Lama, Jacqueline Boudy adorait Serge Lama.
D'aventures en aventures...
Jacqueline Boudy née Lagarde le 16 août 1942 à Nontron est morte ce 24 juillet 2023 à Périgueux.
Cette date du 24 juillet n'est pas innocente.
Nous y reviendrons plus tard.
Nous avons de la peine, bien sûr beaucoup de peine.
Comme l'a dit son amie d'enfance, son amie de toujours Marie-Christine Richard :
" Nous ne cesserons jamais de penser et de parler de Jacqueline."
Les morts doivent vivre ainsi avec les vivants, tous ensemble.
Jacqueline, ma maman, est née dans une famille d'Artisans et de Combattants.
Son grand-père Etienne, Ferblantier à Nontron, a intégré un bataillon à Joinville dans le Val de Marne, Val-de-Marne où mes 2 enfants sont au Collège aujourd'hui, dans la commune voisine de Vincennes.
Cette formation militaire, il était Sous-officier, l'a conduit à Verdun en 1916, au coeur de l'horreur que vous connaissez tous. La bataille de Verdun surnommée "La Boucherie" par les Historiens. Coriace, il en est revenu, blessé, affaibli mais vivant.
Jacqueline est morte ce 24 juillet.
Le 24 juillet 1944, je le rappelle pour ceux qui sont meilleurs en Géographie qu'en Histoire, Nontron a failli être anéanti par les Nazis.
Et le père de Jacqueline, Jean Lagarde, a certainement eu la plus belle peur de sa vie.
Vers 8h00 du matin une colonne de 500 militaires allemands et auxiliaires, un ramassis de collabos, de type miliciens, la franc garde, soi-disant patriotes d'extrême-droite mais surtout assassins.
Ces buveurs de sang anti-républicains (parce qu'ils pouvaient concevoir la France sans la République) se présentent au portes de Nontron, solidement armés, à Javerlhac.
On ne connaît pas l'intention des Allemands bien qu'un second Oradour sur Glane soit à parier. Incendie, meurtres et vengeances sont à prévoir.
La ville de Nontron depuis le débarquement en Normandie des Alliés le 6 juin a été libérée mais parfois des unités allemandes reviennent dans les villes pour se venger et commettre des exactions.
Heureusement, des résistants locaux, une trentaine, sont alertés et commencent à tirer sur la colonne pour l'immobiliser.
Préventivement les habitants de Nontron quittent leur maison et se regroupent au bord du Bandiat.
En milieu de matinée...
Des renforts arrivent par camion. Dans un premier camion il y a Jean Lagarde dit Dudule, le père de Jacqueline, les archives de la résistance indiquent que Jean fait des blagues pour essayer de détendre les copains. Il y a des rires, des connivences, de l'amitié. Imaginez-vous la peur terrible, incommensurable, de ces jeunes hommes en civil qui vont défier la meurtrière et renommée armée allemande. Ils ont pour certains des armes datant de la guerre de 1870 voire des fusils de chasse. Peu de formation militaire.
Mais le courage fait la différence, sans rien lâcher, ils tiennent tête aux assassins et
vers 15h00 les résistants sont une centaine à tirer.
La colonne prend peur et reflue vers Angoulême. Un second Oradour sur Glane a probablement été évité.
Issue de cette famille d'Anciens combattants Jacqueline a ensuite poursuivi le combat... pour le bien de tous.
Elle a fait des études à Périgueux. Elle est devenue Intendante dans l'Education nationale. Elle a veillé toute sa vie à ce que les enfants mangent bien. Pour lutter contre l'inégalité sociale il est important de commencer par bien manger. Il ne peut y avoir d'esprit sain que dans un corps sain disait Montaigne.
Le radical socialiste Pierre Mendes-France fit longtemps distribuer un verre de lait à l'école, collectif et gratuit lors, des récréations du matin.
Même dans un collège de 400 élèves, en dordogne, en Loire-Atlantique ou en Charente-maritime, partout où Jacqueline a ete affectée... d'Aventures en aventures...
Si un seul élève n'avait pas bien mangé, faisant des rondes spécialement aux heures des repas, Jacqueline l'avait remarqué, elle le savait et elle allait le voir.
Et le problème pouvait dès lors peut-être se résoudre.
Jacqueline a ainsi poursuivi le combat de ses ainés pour le bien des autres dans l'Education populaire. Militante associative elle a été Monitrice de colonie de vacances et Sous-directrice à Hendaye, Murat le quaire, Saint-Georges de Didonne.
A Saint-Georges de didonne avec la FOL- fédération des oeuvres laïques- colonie de vacances fondée en 1954 par mon parrain l'instituteur et Sénateur-Maire Roger Roudier, la mer était au coeur du projet pédagogique.
Il s'agissait pour des milliers de petits périgourdins de voir la mer qu'ils n'avaient jamais vu.
Et ensuite d'approfondir toutes les connaissances de l'environnement maritime.
Procurer aux jeunes le bonheur de la découverte et de l'émerveillement.
Jacqueline a ainsi poursuivi le combat avec nous ses enfants, Véronique et Stéphane. Elle nous trimbalait partout avec son Ami 8.
Au Basket, au Cours de musique, au Cinéma...
Je me souviens d'une journée enneigée à Saint-Genis de Saintonge. J'étais enfant, à l'arrière de la voiture, et elle avait ses longs cheveux noirs.
Dans un grande ligne droite... Dans l'intimité d'un enfant avec sa mère...
Il neigeait et nous glissions sur la route. La voiture dérapait.
Nous avions un peu peur... mais on riait.
Jacqueline a fait voyager ses enfants et ses petits enfants aux quatres coins du monde.
Véronique, Stéphane, Gabrielle, Clémence, Victor et puis mes deux enfants : Jeanne et Ferdinand.
Tunisie, Etat-unis, Angleterre, Italie...
Elle voulait que chacun fasse au moins un grand voyage.
Assisté par mon père Roger Boudy, dont elle était tombée amoureuse en colonie de vacances à Hendaye il y a un peu plus de 60 ans, Jacqueline s'est engagée dans un dernier combat il y a peu. Il a commencé en 2016. La lutte contre
Une maladie incurable, la fibrose pulmonaire idiopathique.
Et elle l'a aussi gagné d'une certaine manière.
Aidée par mon père Roger Boudy, exemplaire, valeureux, cuisinier, taxi, soignant... Mon père disponible sans limites... De jour comme de nuit... Elle a tenu tête au destin près de 7 années. Ce qui est très rare pour ce type de maladie. Maladie où l'on voit lentement ses capacités pulmonaires se réduire...Et son physique diminuer, les handicaps se succédant. Maladie invivable, sans doute proche de la torture.
Et elle a choisi de partir un 24 juillet.
Merci pour tous ces combats et merci pour cet amour.
Comme dit ton amie Marie-Christine Richard, nous ne cesserons jamais de parler de toi, Maman.
Stéphane Boudy