Hubert Lemée
Années 1993
à 2004 à l’école Ange
Guépin
François
Le Ménahèze témoigne de ses
années dans une
équipe Freinet, de l’implantation dans une
école existante déjà autour
d’un
projet d’école ouverte.
C’est durant
l’année scolaire
1992-1993 que j’ai rencontré à plusieurs reprises le
directeur en place de
l’école Ange Guépin, Hubert
Lemée. Il était devenu impossible pour moi de
poursuivre mon cheminement professionnel de manière
isolée (même si je
travaillais déjà à
l’époque dans le groupe Freinet du
département). Je
travaillais depuis trois ans dans une école rurale dans
laquelle j’ai connu
moultes difficultés, en particulier avec les parents
d’élèves et la directrice
de l’école. Et, pourtant,
c’était là que je faisais la
connaissance de celui
qui prendra des années plus tard la relève
à l’école Ange Guépin. Comme
quoi…le
vers était déjà dans le
fruit…
Je
cherchais donc une école à investir, une
équipe
à construire. Ange Guépin ne
demandait que cela car l’actuel directeur était
sur sa
dernière année avant la
retraite et s’inquiétait de
l’évolution de
l’école. Il se retrouvait très
isolé
dans l’équipe qui avait perdu sa dynamique du fait
des
départs réguliers et des
aléas des nominations. Il craignait de plus de voir la
direction
demandée par
un collègue qui était depuis
déjà un an
à l’école et n’envisageait
cette école
comme une mise en valeur personnelle.
Je
réussissais à convaincre un ami du groupe Freinet
local, Yves Fradin, de
demander les postes vacants avec moi. Il travaillait pourtant dans le
spécialisé (segpa) mais il
n’hésita pas à venir rejoindre ce beau
projet. Cette
école s’offrait à nous, à la
pédagogie Freinet. Depuis son origine, elle
disposait déjà d’une histoire
d’aventure pédagogique et humaine. Elle avait
été
en tout cas réfléchie dans un cadre
d’ouverture, de par son projet d’origine,
de par les personnes qui l’ont fait vivre.
Grande
chance au moment du mouvement, nous obtenions nous deux les postes
vacants.
Malheureusement, je n’obtins pas la direction. Ca ne nous
apparaissait pas très
grave dans un premier temps, mais ça
l’était car
c’est le collègue déjà en
place qui l’obtint…et ce qui avait
été
pressenti se révéla exact. Il n’avait
aucun projet pour cette école à part une certaine
reconnaissance auto-centrée
personnelle et institutionnelle. Les premières
années se
révélèrent donc très
difficiles ; notre objectif (nous étions au moins
trois– la majorité de
l’équipe - avec Yves Fradin et Monique Cottereau
–
déjà travaillant depuis
quelques années à Ange Guépin)
était
d’orienter l’école en
pédagogie Freinet.
C’est
cependant durant ces années que nous avons
travaillé à la constitution d’une
Charte pour l’école. Celle-ci a vu le jour en
1996, accompagné d’un règlement
intérieur. Il s’agissait
d’élaborer notre cadre commun, notre argumentaire
philosophique,
politique, pédagogique que nous voulions de cette
école. Ce travail
« théorique » sur nos
principes de travail était essentiel. Il nous
donnait le sens, la cohérence que nous cherchions et surtout
des bases solides
de travail au quotidien, avec les enfants, avec les parents, avec
l’institution.
Durant
ce temps, et des difficultés occasionnées par
notre cher directeur qui
maintenait des pratiques pédagogiques …et
humaines…on en peut plus
traditionnelles, la situation est devenue très conflictuelle
et c’est l’action
des parents qui a définitivement conclu son
départ de l’école.
La
voie était libre pour travailler autour de notre Charte et
de construire à
partir des principes et pratiques de la pédagogie Freinet,
notre organisation
pédagogique et nos propres outils.
Notre
collègue, Monique Cottereau, a assuré la
direction en raison de son ancienneté
dans le métier (il fallait en effet jongler avec les
barèmes de chacun pour
conserver la direction dans nos rangs). J’ai pris la
direction ensuite pendant
quelques années pour la laisser à
Françoise Salmon – qui est partie depuis dans
la région parisienne et est rentrée au CA de
l’ICEM (là aussi avec un jonglage
entre les postes d’adjoints et de direction) pour conserver
la direction de
l’école. Celle-ci l’a laissé
en 2005 à Paul Calard, actuellement directeur de
l’école. Entre temps, était venue nous
rejoindre une collègue qui a beaucoup
influencé la dynamique de l’équipe, Cat
Ouvrard – depuis également devenue
secrétaire nationale de l’ICEM et ayant
conservé un poste sur le quartier
Malakoff.
L’équipe
a donc enfin pu se construire autour d’une direction
collégiale effective et de
la constitution de classes en classes de cycle.
Nous
avons pu faire vivre à la fois la Charte de
l’école et le règlement
intérieur,
document essentiel là aussi car reprenant nos pratiques
réelles au niveau de la
responsabilisation des enfants dans l’école et
notre réel souci d’éducation
à
la citoyenneté.
Ce
travail coopératif ne pouvait évidemment en
rester là. Il ne prenait sens que
si nous construisions parallèlement un certain nombre
d’institutions, d’outils
qui devaient représenter l’illustration
quotidienne de notre travail.
Parallèlement
à cette lente construction de notre projet, nous
déclinions déjà dans nos
classes un certain nombre de pratiques. Celles-ci furent donc mises
à plat,
mutualisées pour figurer dans la
Charte mais surtout aussi pour nous construire une culture commune de
réflexion, de pratique quotidienne dans la classe, dans
l’école.
Prirent
alors naissance …ou du moins
réalité…quelques pratiques
indispensables
pour nous à l’époque :
-
La composition en classes de cycles : n’ayant
malheureusement pas de
maternelle, nous organisions l’école en deux
classes de cycle 2 (cycle des
apprentissages fondamentaux, correspondant à GS, CP et CE1
– nous n’avions pas
les GS) et trois classes de cycle 3 (cycle des approfondissements,
correspondant à CE2, CM1, CM2) ;
-
Le conseil d’enfants de l’école, en
articulation avec les conseils de classe
(voir l’organisation plus
précise dans
la Charte), avec l’enjeu de former chaque année le
maximum de délégués
enfants ;
-
Le livret de formation, décliné en
compétences de cycles (qui a d’ailleurs
depuis servi à de nombreux collègues qui ont
pu l’adapter à leurs conditions) ;
-
La direction collégiale, organisée autour de
responsabilités réparties au sein
de l’équipe et en fonction de son degré
d’implication et de ses
compétences ; régulée par un
conseil des maîtres hebdomadaire ;
Ce
travail de l’équipe pédagogique se
confrontait régulièrement à quelques
« experts
freinétiques » que nous avions la chance
d’avoir à
proximité :
-un
collègue « à la
retraite » mais encore tellement actif (Jean Le Gal)
pour tout ce qui était construction de la loi et
élaboration du règlement
intérieur. Connaissant
son exigence et
ses compétences, il ne s’agissait pas seulement de
mettre tout cela sur le
papier, mais bien de le confronter à la pratique
quotidienne. Notre maxime de
praticiens-chercheurs devenait enfin une réalité.
-et
puis venait se greffer à cela un autre trublion-chercheur
(André Mathieu) qui
démarrait alors le travail sur sa thèse autour de
la démocratie dans une
équipe Freinet. Inutile de vous dire
que les apports en
la matière furent
réciproques (Mathieu A., « De
la théorie démocratique à son essai
d’application dans une école
Freinet », thèse doctorat
Bordeaux 2,
2004)
Les
observations, remarques de ces deux
« analyseurs » nous obligeaient
à
nous sortir de notre réalité quotidienne si
prenante lorsqu’on est enseignant
Freinet impliqué quotidiennement dans une équipe.
Cette prise de recul nous a
sans doute permis bien des avancées dont nous
n’avons plus maintenant
conscience mais qui permettaient à cette équipe
de se construire et, surtout,
de faire vivre la pédagogie Freinet avec cette centaine
d’enfants de tout
horizon qui travaillaient à nos côtés.
Nous
avons du travailler aussi parallèlement un autre
élément important. Lors de
notre arrivée,
l’hétérogénéité
de la
population scolaire était réelle mais sans
doute très disproportionnée. En effet, les
familles
effectuant un choix
éducatif quant à l’inscription de leur
enfant
à l’école étaient
importantes en
nombre. Cela se ressentait sur toute une vie
d’école qui
était très forte, une
présence importante des parents dans les
activités de
classe et hors classe.
Quelques souvenirs :
-le
« coup de pouce » du soir,
organisé par quelques parents pour prendre
en charge après la classe quelques enfants en
difficulté ;
-la
vie de la BCD, animée en grande partie par des parents, puis
naissance des
premiers emplois d’animation de BCD ;
-des
ateliers musique fréquents coordonnés par les
parents
…
On
ne peut pas dire que cette démarche volontariste des parents
nous déplaisait,
mais en notre for intérieur, nous avions
l’impression que nous ne travaillions
pas en pédagogie Freinet pour ces familles.
Cette
réflexion a coïncidé à ce qui
s’échangeait également au sein du
réseau des
équipes Freinet en France, car le constat était
le même pour un certain nombre
d’équipes. C’est le moment où
nous avons travaillé à une plate-forme des
équipes Freinet qui recentrait notre action
auprès des milieux populaires. Cela
coïncidait aussi avec les projets
d’établissements innovants qui fleurissaient
à l’époque au niveau national et que
nous pouvions porter au niveau de l’ICEM
et en particulier au niveau du réseau des équipes.
Ces
constats et réflexions nous ont amenés au fur et
à
mesure à prendre des options
plus franches à l’égard des
inscriptions :
inscriptions directes des
enfants du quartier, vigilance face aux demandes
extérieures…. C’est ainsi sans
doute que nous avons recentré l’école
sur une plus
grande
hétérogénéité
avec
une orientation forte sur le quartier. Nous avons alors,
grâce
aussi au
changement d’inspecteur, obtenu d’être
école
associée à la ZEP. Entre temps,
nous avions obtenu un statut d’
« école à
favoriser »,
compte tenu d’une population scolaire très
hétérogène, avec en particulier un
nombre important d’enfants en grande
difficulté.
François
Le Ménahèze, octobre 2007
La chercheuse déclencheuse de souvenirs Julie Pagis | 2007 |
Pionniers 1e époque Malakoff 5 | |
1e directeur André Sévère | 1975-1979 |
Pierrette Jochaud | 1975 |
M.Banes | 1975 |
Melle Loussouarn | 1975 |
Annick Corlay | 1975 |
Melle Denizeau | 1975 |
1e conseiller pédagogique René Jan | 1975 |
Le créateur Roger Boudy IDEN Nantes3 | 1973-1977 |
2e époque | |
2e Directeur Hubert Lemée | 1979-1992 |
3e époque | |
3e directeur Erick Harbonnier | 1993-1996 |
4e époque | |
4e directrice Monique Hivert (Cottereau) | 1996-2000 |
5e époque | |
5e directeur François Le Ménahèze | 2000-2004 |
6e époque | |
6e directrice Françoise Salmon | 2004-2005 : |
7e époque | |
7e Directeur en poste actuellement Paul Calard | 2005- |
Partenaires | |
Architecte Ville de Nantes M. Evano | 1975 |
Nathalie Croguennoc mouvement Freinet | 2007 |