Fête de départ avec les amis
et les personnels enseignants le 24 juin 2003
Le sens de ma vie...
, apprendre et faire apprendre...
Mesdames, Messieurs, mes chers amis, (enseignants de 8 secteurs scolaires,
Périgueux, Chamiers, La Roche Beaulieu, Neuvic, Tocane, Ribérac,
St Aulaye, Mareuil; amis de l'école, adhérents de l'association
l'Air du Temps 3000; ma famille, amis de toujours; j'ai reçu beaucoup
de lettres de Nantes, Jonzac, Sarlat et Périgueux3 de ceux qui ne
peuvent être là...
Je vais d'abord vous remercier pour les compliments.....
et pour l'organisation de cette manifestation, mes remerciements
vont aussi au comité d'organisation, secret d'abord, discret et efficace.
Je remercie tous ceux qui sont là en pensant à d'autres disparus
prématurément, de Périgueux 3( 1972/1973), de Nantes
3 (1973/1977), de Jonzac(1977/1983), Sarlat (1983/1990) et Périgueux
3 (1990/2003).
De Périgueux 3 à Périgueux 3 il s'est passé 30
ans, envolés, trop rapidement.
Je m'en vais c'est sûr après 43 ans à l'école,
et au service de l'école publique, laïque, obligatoire et républicaine.
Je m'en vais heureux et confiant en l'avenir... à voir le
visage de certains mon poste devient enviable, pour ma part j'ai l'impression
de redoubler, l'âge est là et je ne tiens pas à atteindre
la limite d'âge (dans quatre ans) ni dépasser mes limites.....
L'école est un lieu magique sans cesse renouvelé - et éternellement
jeune on ne peut pas y vieillir tranquillement... l'école
est un milieu en perpétuel mouvement, tous les ans 10% des enseignants
partent à la retraite 25% demandent une mutation, tous les élèves
changent, on se retrouve très rapidement seul.
Je ne vais pas trop vous raconter ma vie seulement la partie qui nous est
commune ou en relation avec les idées et les réflexions
du doyen des inspecteurs de France.
J’ai découvert l’école en qualité d’élève
presque clandestin à mon entrée dans une école publique
très rurale à 2 classes à 4 ans 3/4, il aurait fallu
avoir 5 ans car le livre de lecture s'appelait "nous avons cinq ans", les
dérogations existaient déjà! .
Pourquoi être devenu inspecteur?
Elève j'avais bien remarqué que le jour où l’inspecteur
venait les tableaux étaient plus colorés et la maîtresse
ou le maître plus beaux.
Devenir inspecteur pour de tels motifs apparaît un
peu léger !!..
Pourtant j'étais un professeur de collège heureux,
délégué élu du personnel, dans un collège
unique, dans tous les sens du terme, qui regroupait tous les élèves
de milieux les plus favorisés, c'est encore vrai, confirmation par
l'enquête des PCS Ed. Nationale; j'enseignais les mathématiques
et les sciences, on était au top, en faisant des transplantations
cardiaques sur les grenouilles en même temps que le professeur Barnard,
on construisait des ordinateurs avant Bill Gates, mes élèves
réalisaient des choses extraordinaires... les moins favorisés
faisant davantage d'heures de mathématiques, les instructions officielles
d’alors le permettant, j'avais l'impression de donner à mes élèves
l'égalité des chances.
Pour ma part je redoublais tous les ans et je m'ennuyais un peu
de ne plus apprendre, alors je pensais que faire de la recherche en pédagogie
pouvait conduire à trouver des solutions pour donner davantage de
chances aux élèves et aider les maîtres à mieux
réussir.
Pour m'évader de mon collège et apprendre plus, une seule porte
de sortie, le concours d'inspecteur primaire ou de l'enseignement technique
qui, à cette époque, donnait une équivalence universitaire
pour pouvoir faire de la recherche en psychologie ou pédagogie.
A l'époque on recrutait plus sur des savoirs, que de vagues critères
qui tendent à remettre aujourd’hui la morphopsychologie du Dr Corman
à la mode ( Nantais que j'ai connu!) .
Jacqueline mon épouse, m’encourageait en gardant nos enfants, adorables,
après son difficile et laborieux travail d’intendance universitaire
; je m’inscrivais au CNED passait les concours à Bordeaux, les oraux
à Paris... je me retrouvais donc à NANTES.
Pour apprendre un peu plus, j'allais à l'université de Bordeaux
le jeudi et les samedis à celle de Rennes 2( pas la même année,
car il y avait aussi le travail quotidien!), mes enfants Véronique
et Stéphane, et Jacqueline continuant à faire du tourisme en
pays de Loire tout en veillant srupuleusement au collège du Hérault
à St Herblain.
La recherche c'est merveilleux car, on trouve toujours quelque chose, une
expérience çà marche toujours avec des degrés
d’incertitudes ( de 2 à10% ) mais pour rester au top on ne peut communiquer
qu'avec une poignée d'initiés, autour de la planète,
c'est l'enfermement dans un langage particulier de concepts à renouveler
sans cesse.
En faisant des expériences dans mes classes, j'avais remarqué
que mes élèves apprenaient mieux, quand moi-même, j'étais
en train d'apprendre, je leur transmettais alors l'envie d'apprendre, c'est
sans doute là, le nerf d'une pédagogie efficace.
Telle est la méthode que j'ai essayé d'appliquer avec mes
administrés, et tout à l'heure je vous montrerais des images
souvenirs durant vingt minutes de ces moments vécus en commun.
Tout le monde pense posséder la meilleure méthode et le
croît fermement, j'ai dû modérer ces croyants impénitents(sorte
de parfaits) à ce sujet, leur montrer qu'il en existe d'autres, et
surtout que l'on pouvait construire ensemble, en s'appuyant sur la dynamique
de groupe, une méthode basée sur l'observation et l'expérimentation.
Le but étant de changer les croyances en les faisant évoluer,
sans apparaître comme un hérétique; deux outils (l'informatique
et le pilotage d'avion) m'ont été essentiels dans cette démarche
d'approche de la vérité!
L'informatique à ce sujet m'a permis d’établir suite à
de laborieuses expérimentations que "les élèves de certains
milieux sociaux très défavorisés( très marqués
par leur milieu de vie) réussissent mieux ou aussi bien que d'autres
si on leur donne plus de temps pour apprendre en leur accordant plus d'attention,
à condition également de changer à certains moments
les objectifs". Pour vérifier cela il faut utiliser des méthodes
statistiques qui demandent d'énormes calculs que les ordinateurs
exécutent aisément, à condition de les avoir bien programmés
; les vérités sur lesquelles on s’appuie méritent ainsi
d’être vérifiées!
Avec humour je dirai que l’informatique a pris peu de place et très
peu de temps dans ma vie, le temps de mettre au point quelques logiciels
pour faciliter la tâche de mes secrétaires successives (et pour
moi y voir plus clair) ,permettre aux élèves de mieux apprendre,
et au maîtres de mieux communiquer… j’ai dû convaincre mon entourage
que je ne me battais pas avec un ordinateur mais que j’apprenais des tas
de subtilités ! langages basic,asp, php, html etc.. pour déjouer
de nombreux pièges!
Avec humour je dirai aussi que piloter un avion, c’est facile, mais il faut
savoir où l’on va si vite ! bien se repérer en ne perdant aucune
dimension en particulier la 3e, l’altitude ! C’est une bonne éducation
à la maîtrise de soi ; je pensais conduire maîtres et
élèves à l’observation photographique aérienne
et à l’étude du milieu, 100% de réussite en altitude,
ils avaient tellement peur qu’ils n’osaient pas dire qu’ils ne comprenaient
rien !! au retour, si le mal de l’air n’avait pas trop fait de dégâts
les questions arrivaient après la joie d’avoir été plus
léger que l’air, d'avoir partagé beaucoup d’émotions
fortes, l'aéropsychopédagogie reste à réinventer!..
Informatique, pilotage d’avion sont des domaines qui font croire que l'on
va maîtriser le temps et l'espace dont la nature humaine est prisonnière.
En fait on ne rétrécit ni l'espace ni le temps immuables, à
vouloir trop apprendre, on ne peut aller que d'illusion en désillusion
sans reconnaissance sociale.
Apprendre pour le plaisir à l'école, pour vaincre ses peurs,
ses angoisses et communiquer ce plaisir aux autres, telle fut la base de
mes activités de Périgueux 3 à Périgueux 3 en
passant par Nantes 3, Jonzac, Sarlat avec les enseignants; je voudrais les
remercier tous, des bords de la Nizonne, au val de la Lizonne, au val
et aux bords de l'Isle, ce sont tous des gens, merveilleux, sérieux,
désintéressés, dévoués à la cause
publique et à l'intérêt général.
Remerciements particuliers à la jeune secrétaire Mme Hautier
Marchand venue travailler par hasard à Périgueux 3, 2années
¾, notre administration devenant très avare en comptant en
nombres décimaux.
Remerciements encore plus particuliers à mes plus proches collaborateurs
Messieurs Pierre Brochard et Claude Marjarie conseillers pédagogiques,
nous connaissant depuis très longtemps, nous étions comme 3
hommes dans un bâteau (comme d'ailleurs auparavant avec Marc Veyssière
ou Claude Crapez à Jonzac), vieux marins aguerris, dans des situations
parfois cocasses digne des héros de Jérome K Jérome,
nous n’avions pas besoin de beaucoup parler pour résoudre les problèmes
et affronter les tempêtes pédagogiques !
Certes comme dans toute mini société, il y a des crises, des
situations extrêmes que j'ai dû régler, comme celle des
plaintes à l'encontre des enseignants, méthodes, comportement,
look, remise en question de leur action etc.. j'ai toujours fait en sorte
que le dénoncé soit au courant des faits pour mieux y répondre
et qu'un minimum de dialogue puisse s'établir entre dénoncé
et dénonciateur afin de désamorcer les conflits pour développer
la compréhension entre les individus, dans une démarche, éducative
pour tous.
Statutairement j'ai été le supérieur hiérarchique
sans me sentir supérieur à quiconque, pensant toujours que
notre richesse venait de la diversité des individus, même si
à certains moments j' ai dû faire preuve d'autorité pour
défendre les individus et l'institution.
Plus tolérant sur la diversité des élèves,
les opinions dérangeantes de certains pour mieux comprendre et rechercher
des solutions, avantagé quand même par ma distance vis à
vis des évènements.
J'ai vécu 30 années merveilleuses et extraordinaires au milieu
de vos talents professionnels de pédagogues et de tous vos talents
cachés, tous enrichissants pour l'école et vos collègues.
Au-delà de mes appréciations, des conseils donnés
ici et là j'ai cherché à mobiliser tous ces talents.
Faire croire aux uns qu’ils sont supérieurs aux autres ou plus
intelligents ou plus utiles, c'est privilégier l’individualisme au
dépens de la coopération et du travail en équipe.
Il en est de même pour la notation des élèves, docimologie
hier, évaluation aujourd'hui, sont en relation avec un système
de valeurs extérieures à l'individu et arbitraires, on ne peut
que mesurer leurs limites dans l'amélioration des progrès des
élèves.
Mesurer l'intelligence est une démarche aussi peu productive pour
l'éducation et la socialisation des individus, les psychologues, ne
me démentiront pas... être intelligent d'un point de vue académique
ou avoir un QI normal ne reflète qu'une série d’habiletés
définie par une suite de questions et de manipulations (élaborées
par Binet et Simon en 1905 à la demande du Gouvernement de l'époque);
être un bon élève aujourd'hui à la sortie de
l'école primaire c'est satisfaire à un minimum de 320 compétences,
telles sont les instructions officielles actuelles, mais beaucoup d'autres
compétences sont négligées.
Néanmoins LIRE ECRIRE COMPTER c'est bien l'essentiel, à
condition de ne pas oublier l'épanouissement de l'individu, la promotion
de sa créativité en lui laissant faire ses expériences
tout en les encadrant habilement.
Ma gratitude et mes remerciements vont aussi à tous les membres d'
associations que j'ai créées ou auxquelles j'ai participé
ou continue de participer, j'y ai rencontré des personnes qui gardaient
toutes de l'école une image positive, heureux d'apprendre ensemble
des connaissances et de partager des émotions.
J’aurai fait plus de dix fois le tour de la terre en visitant des écoles
jusqu’au bout du monde, vous avez bien fait d'organiser cette magnifique
et formidable cérémonie où le disparu voit encore tous
les vivants qui lui sont chers, c'est magique!
Il faut être à la mode et européen, sous peine de bannissement,
aussi pour ne pas être dépaysé le deux octobre,
j'ai recherché le mot de retraité, en anglais "pensioner",
espagnol "jubilado... jubiloso"(m'a dit mon ami José Manuel.. le retraité
jubile..), en allemand "renter" en italien "pensionado" en portugais "retirado";
je serai donc: " un renter retirado pensioner pensionado jubilado .. jubiloso!",
il me reste encore à apprendre une bonne douzaine de langues d'ici
la rentrée!
Ce mot en lui-même n'a rien de réjouissant sa signification
confirme ce qu'un homme célèbre disait : "la retraite est un
naufrage".
Alors je vais vous faire une confidence, j'ai loué un banc public,
à Royan, sur le port, face à la mer, dans l'air du temps, c'est
là que je vais m'installer, quand je verrai le naufrage arriver, je
me retournerai vers la terre pour vous voir comme aujourd'hui et celui-ci
me sera d'autant plus agréable.....
Mais je ne suis pas pressé !
Il me reste encore beaucoup de joies familiales à partager, aider
si besoin mes petits enfants à grandir, je suis rassuré car
ils ont des parents solides; lire en exclusivité les créations
de mon écrivain de fils, cinéaste et philosophe à ses
heures!..
Je n'oublie pas qu'il faudra que j'obéisse à mon épouse,
les jours de fête, mais la retraite ce sera la fête tous les
jours!..
Je souhaite que nous nous rencontrions encore très souvent, à
nous tous de multiplier les occasions, sorties, voyages, culturels et touristiques..
Je serai toujours disponible pour répondre à toutes vos
invitations… si j’arrive à me construire un emploi du temps dynamique
et valide !
Merci à vous tous, et à bientôt, que la vie continue,
vogue la galère et vive la fête! ... Je vous regretterai tous.
Vive l'école, vivent les enseignants!..
On peut regarder les images souvenirs tout en buvant l'apéritif!
...
La retraite ce sera vraiment le Pérou!!
ROGER BOUDY le 24 JUIN 2003
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